La création d’une société implique souvent un délicat exercice d’équilibre entre nécessités pratiques et contraintes juridiques. Nombreux sont les entrepreneurs qui se retrouvent confrontés à l’urgence de signer des contrats essentiels – bail commercial, accords avec des fournisseurs, prêts bancaires – alors que leur société n’est pas encore officiellement constituée. Cette situation, loin d’être exceptionnelle, soulève des questions juridiques complexes concernant la validité de ces engagements et la responsabilité des signataires.
Le droit français encadre strictement ces pratiques à travers un ensemble de dispositions légales et jurisprudentielles qui définissent les conditions dans lesquelles ces actes peuvent être valablement conclus. La compréhension de ces mécanismes s’avère cruciale pour tout entrepreneur souhaitant sécuriser ses démarches constitutives tout en préservant ses intérêts patrimoniaux.
Cadre juridique de la signature de contrats par une société en formation
Article 1843 du code civil et la théorie de la société en formation
L’article 1843 du Code civil constitue le fondement juridique de la théorie de la société en formation. Cette disposition établit un principe fondamental : les personnes qui agissent au nom d’une société avant son immatriculation engagent leur responsabilité personnelle . Le législateur reconnaît ainsi la réalité économique selon laquelle certains actes doivent nécessairement être accomplis avant l’obtention de la personnalité morale.
La notion de société en formation désigne cette période transitoire durant laquelle les fondateurs manifestent leur volonté de créer une entité juridique sans que celle-ci ait encore acquis son existence légale. Cette phase s’étend de la prise de décision de constituer la société jusqu’à son immatriculation effective au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS).
Le mécanisme de reprise prévu par l’article 1843 offre une solution élégante : la société régulièrement immatriculée peut reprendre les engagements souscrits, qui sont alors réputés avoir été contractés dès l’origine par celle-ci . Cette fiction juridique permet de résoudre la contradiction apparente entre l’absence de personnalité morale et la nécessité d’agir.
Responsabilité des fondateurs selon l’article L. 210-6 du code de commerce
L’article L. 210-6 du Code de commerce complète le dispositif en précisant les modalités de responsabilité des fondateurs. Cette responsabilité revêt un caractère solidaire pour les sociétés commerciales, ce qui signifie que chaque fondateur peut être poursuivi pour la totalité des engagements contractés, sans bénéfice de division.
Cette solidarité constitue un mécanisme protecteur pour les cocontractants, mais expose les fondateurs à des risques patrimoniaux considérables. En effet, jusqu’à ce que la société reprenne formellement les engagements, les signataires demeurent personnellement et intégralement responsables des obligations souscrites.
La jurisprudence a précisé que cette responsabilité ne se limite pas aux seuls dirigeants de la future société, mais s’étend à toute personne ayant agi en son nom. Cette interprétation extensive vise à prévenir les montages frauduleux où des prête-noms seraient utilisés pour échapper aux conséquences patrimoniales des engagements pris.
Distinction entre actes conservatoires et actes de gestion courante
Le droit des sociétés opère une distinction subtile entre différentes catégories d’actes susceptibles d’être accomplis durant la période de formation. Les actes conservatoires, nécessaires à la préservation des intérêts de la future société, bénéficient d’un régime plus souple que les actes de gestion courante.
Les actes conservatoires comprennent notamment les démarches visant à protéger une marque, à réserver un nom commercial ou à prendre une option sur un local commercial. Ces mesures préventives sont généralement admises sans formalisme particulier, dans la mesure où elles ne créent pas d’obligations définitives.
Les actes de gestion courante , en revanche, impliquent des engagements plus substantiels et requièrent le respect de conditions strictes pour leur validité. Cette catégorie englobe les contrats de fourniture, les baux commerciaux, les emprunts bancaires ou les contrats de travail. Le non-respect du formalisme requis expose ces actes à la nullité absolue.
Jurisprudence de la cour de cassation sur les engagements pré-constitutifs
La Cour de cassation a développé une jurisprudence particulièrement riche concernant les engagements pré-constitutifs. L’arrêt de principe du 29 novembre 2023 marque une évolution notable dans l’appréciation de la validité de ces actes. La Haute juridiction abandonne le formalisme strict au profit d’une approche plus pragmatique basée sur l’intention des parties.
Selon cette nouvelle orientation, la nullité du contrat n’est plus automatique en l’absence de mention expresse , dès lors que l’intention commune des parties de contracter pour le compte de la société en formation peut être établie par d’autres moyens. Cette évolution jurisprudentielle reflète une adaptation du droit à la réalité économique.
La Cour de cassation considère désormais que le juge doit rechercher, dans l’ensemble des circonstances entourant la conclusion de l’acte, si les parties avaient réellement l’intention de permettre la reprise ultérieure par la société.
Cette approche nécessite néanmoins de documenter soigneusement les négociations et l’exécution du contrat pour établir cette intention commune. Les praticiens recommandent de conserver l’ensemble des échanges et documents démontrant la finalité de l’engagement.
Mécanismes de reprise des engagements par la société définitivement constituée
Procédure de reprise expresse par assemblée générale extraordinaire
La reprise expresse constitue le mécanisme le plus sûr pour transférer les engagements pré-constitutifs à la société nouvellement immatriculée. Cette procédure requiert une délibération formelle des associés, généralement adoptée lors d’une assemblée générale extraordinaire convoquée spécialement à cet effet.
La délibération doit identifier précisément chaque engagement à reprendre, en mentionnant la nature du contrat, l’identité du cocontractant, les obligations principales et les modalités d’exécution. Cette exigence de précision vise à garantir que les associés donnent leur consentement en pleine connaissance de cause.
L’effet rétroactif de la reprise présente un avantage fiscal non négligeable : les droits d’enregistrement et taxes diverses ne sont pas exigibles une seconde fois, la société étant réputée avoir contracté dès l’origine. Cette économie peut s’avérer substantielle pour les contrats impliquant des montants importants.
La majorité requise pour cette reprise varie selon le type de société et la nature des engagements. Pour les décisions les plus importantes, une majorité qualifiée, voire l’unanimité, peut être exigée par les statuts ou la loi.
Reprise tacite et doctrine de l’apparence juridique
La reprise tacite s’opère lorsque la société, par son comportement, manifeste sans ambiguïté sa volonté d’assumer les engagements contractés en son nom. Cette forme de reprise, moins formelle que la procédure expresse, n’en demeure pas moins juridiquement valable sous certaines conditions.
Les tribunaux recherchent des actes positifs et non équivoques d’exécution du contrat par la société. Le simple paiement de factures ou l’utilisation d’équipements acquis avant l’immatriculation peut constituer une manifestation suffisante de volonté de reprendre l’engagement.
Toutefois, cette approche comporte des risques d’interprétation divergente. La doctrine de l’apparence juridique peut jouer en faveur des cocontractants qui, de bonne foi, ont cru traiter avec la société elle-même. Les tribunaux apprécient souverainement l’existence et la portée de cette reprise tacite.
Conditions de validité de la clause de reprise automatique dans les statuts
L’insertion d’une clause de reprise automatique dans les statuts constitue une technique préventive particulièrement efficace. Cette clause prévoit que la signature des statuts emporte automatiquement reprise de tous les engagements listés en annexe et contractés pour le compte de la société en formation.
Pour être valable, cette clause doit s’accompagner d’un état détaillé des actes accomplis, annexé aux statuts et signé par tous les associés. Cet état doit mentionner, pour chaque engagement, les éléments essentiels permettant son identification : parties, objet, montant, durée et obligations principales.
La précision de cet état s’avère cruciale. La jurisprudence a invalidé des reprises fondées sur des mentions trop générales telles que "frais et honoraires divers" ou "engagements usuels de constitution" . Chaque contrat doit être individualisé et ses implications financières chiffrées.
L’avantage de cette technique réside dans sa simplicité d’exécution : aucune formalité supplémentaire n’est requise après l’immatriculation, la reprise s’opérant de plein droit à cette date. Cette automaticité évite les oublis et simplifie la gestion administrative.
Délais légaux et prescription pour la reprise des engagements antérieurs
Aucun délai légal spécifique ne limite la possibilité de reprendre les engagements pré-constitutifs. Néanmoins, les règles générales de prescription s’appliquent, créant une fenêtre temporelle durant laquelle cette reprise demeure possible.
En pratique, l’écoulement du temps peut compliquer la reprise, notamment lorsque la société tarde à se prononcer. Les cocontractants peuvent légitimement s’interroger sur la volonté réelle de la société d’assumer les engagements, et la preuve de l’intention originelle devient plus difficile à établir.
La prescription quinquennale de droit commun s’applique aux actions en responsabilité contre les fondateurs. Cette période court à compter de la connaissance par le cocontractant de l’absence de reprise par la société. Passé ce délai, les fondateurs peuvent invoquer la prescription pour échapper à leur responsabilité personnelle .
Responsabilité patrimoniale des signataires et co-contractants
La responsabilité patrimoniale des signataires d’engagements pré-constitutifs revêt une dimension particulièrement critique dans l’économie du mécanisme juridique. Cette responsabilité, qui découle directement de l’absence de personnalité morale de la société en formation, expose les fondateurs à des conséquences financières potentiellement lourdes.
L’étendue de cette responsabilité varie selon la nature des engagements contractés et les circonstances de leur conclusion. Pour les sociétés commerciales, la solidarité des fondateurs signifie qu’un créancier peut poursuivre n’importe lequel d’entre eux pour la totalité de la dette, charge à celui-ci de se retourner contre ses cofondateurs pour obtenir leur contribution.
Cette situation génère une asymétrie de risques notable. D’un côté, les cocontractants bénéficient d’une protection renforcée grâce à la solidarité des débiteurs et à la possibilité de poursuivre des personnes physiques disposant généralement d’un patrimoine plus transparent qu’une société naissante. De l’autre côté, les fondateurs assument une responsabilité qui peut excéder leur apport prévu dans la société.
Les mécanismes de garantie personnelle prennent une importance particulière dans ce contexte. Les banques et principaux fournisseurs exigent fréquemment des cautions personnelles des dirigeants, ce qui maintient leur engagement même après la reprise formelle par la société. Cette pratique contractuelle limite l’effet libératoire de la reprise.
La jurisprudence a également précisé les conditions dans lesquelles les cocontractants peuvent renoncer à se prévaloir de l’absence de reprise. Cette renonciation, qui doit être expresse et non équivoque, peut résulter de la poursuite des relations contractuelles avec la société sans réserve pendant une période significative.
La responsabilité des fondateurs ne se limite pas aux seuls aspects patrimoniaux, mais peut également engager leur responsabilité pénale en cas de manœuvres frauduleuses ou de présentation inexacte de la situation de la société en formation.
L’assurance responsabilité civile professionnelle des dirigeants prend une dimension stratégique dans ce contexte. Bien que ces polices ne couvrent généralement pas les engagements contractuels directs, elles peuvent protéger contre les conséquences de fautes de gestion ou d’information commises durant la période constitutive.
Typologie des contrats signables en phase pré-constitutive
L’identification précise des types de contrats susceptibles d’être conclus durant la phase pré-constitutive revêt une importance stratégique pour les entrepreneurs. Cette typologie, forgée par la pratique et affinée par la jurisprudence, permet d’anticiper les risques et d’adapter le formalisme aux enjeux spécifiques de chaque engagement.
Les contrats immobiliers occupent une place prépondérante dans cette catégorie. Les baux commerciaux, en particulier, nécessitent souvent d’être sécurisés avant l’immatriculation pour réserver l’emplacement souhaité. Ces contrats présentent la particularité d’engager la société sur de longues durées et pour des montants substantiels, ce qui justifie un formalisme renforcé.
Les accords bancaires constituent une autre catégorie sensible. L’ouverture d’un compte professionnel, souvent nécessaire pour déposer le capital social, crée une relation contractuelle qui perdure au-delà de la constitution. Les lignes de crédit et facilités de caisse négociées en amont peuvent également faire l’objet de reprises, sous réserve de l’accord de l’établissement bancaire.
Les contrats de fourniture et de prestation de services représentent un enjeu opérationnel majeur. L’anticipation des besoins de la société peut justifier la conclusion d’accords-cadres ou la réservation de créneaux de production chez des fournisseurs stratégiques. Ces contrats nécessitent une attention
particulière aux clauses de livraison et de paiement, qui peuvent engager significativement la trésorerie naissante de la société.Les contrats de travail présentent des spécificités juridiques importantes. L’embauche de salariés avant l’immatriculation crée des obligations sociales immédiates, notamment en matière de déclarations URSSAF et de protection sociale. La reprise de ces contrats par la société s’accompagne du transfert automatique de l’ensemble des obligations patronales.Les accords de partenariat commercial et les contrats de distribution nécessitent une approche prudentielle. Ces engagements, souvent conclus sur la base de projections d’activité, peuvent créer des obligations de résultat difficiles à honorer pour une société en phase de démarrage. La négociation de clauses d’adaptation en fonction du développement réel de l’activité s’avère recommandée.Les contrats d’assurance constituent une catégorie particulière, dans la mesure où ils visent précisément à couvrir les risques liés à l’activité future. L’assurance responsabilité civile professionnelle peut être souscrite avant l’immatriculation, avec prise d’effet différée. Cette anticipation permet d’éviter toute interruption de couverture durant la période critique de démarrage.
Stratégies contractuelles et clauses de sauvegarde pour sécuriser les engagements
Insertion de clauses conditionnelles suspensives d’immatriculation au RCS
L’insertion de clauses conditionnelles suspensives constitue l’une des techniques contractuelles les plus efficaces pour sécuriser les engagements pré-constitutifs. Cette approche consiste à subordonner l’entrée en vigueur du contrat à l’immatriculation effective de la société au Registre du Commerce et des Sociétés.La rédaction de ces clauses nécessite une précision juridique particulière. La condition suspensive doit être formulée de manière objective et vérifiable, en mentionnant explicitement l’obligation d’immatriculation dans un délai déterminé. Une clause type pourrait stipuler : "Le présent contrat ne prendra effet qu'à compter de l'immatriculation de la société XYZ au RCS, cette immatriculation devant intervenir au plus tard le [date]. À défaut, le présent contrat sera réputé caduc de plein droit."Cette technique présente l’avantage de préserver les droits des deux parties tout en évitant la création d’obligations définitives avant l’existence juridique de la société. Le cocontractant conserve la garantie que l’engagement ne pourra être exécuté qu’avec une entité juridiquement constituée, tandis que les fondateurs échappent à une responsabilité personnelle immédiate.La fixation du délai de réalisation de la condition mérite une attention particulière. Ce délai doit être suffisant pour permettre l’accomplissement des formalités constitutives, tout en préservant l’intérêt commercial de l’opération. Un délai de trois à six mois constitue généralement un équilibre acceptable, selon la complexité du projet de société.La jurisprudence a validé cette pratique contractuelle, considérant que les clauses conditionnelles bien rédigées permettent d’éviter les écueils de la responsabilité personnelle des fondateurs. Cette reconnaissance jurisprudentielle encourage l’utilisation de ces mécanismes protecteurs.
Mécanismes de garantie personnelle et cautionnement des fondateurs
Les mécanismes de garantie personnelle offrent aux cocontractants une sécurité supplémentaire tout en permettant aux fondateurs de signer des contrats avant l’immatriculation. Le cautionnement personnel constitue l’instrument le plus couramment utilisé dans cette perspective.Le cautionnement peut revêtir différentes formes selon les besoins de l’opération. Le cautionnement simple engage la caution subsidiairement, après discussion préalable du patrimoine de la société débitrice principale. Le cautionnement solidaire, plus contraignant, permet au créancier de poursuivre directement la caution sans mise en demeure préalable de la société.La limitation du montant du cautionnement constitue une protection essentielle pour les fondateurs. Cette limitation peut être exprimée en valeur absolue ou en pourcentage du montant de l’engagement garanti. La mention manuscrite de l’engagement de la caution, exigée par l’article L. 341-2 du Code de la consommation pour les dirigeants personnes physiques, renforce la protection du garant.Les garanties à première demande représentent une alternative au cautionnement classique. Ces mécanismes, inspirés du droit bancaire international, permettent un appel de garantie simplifié en contrepartie d’une protection réduite pour le garant. Leur utilisation demeure marginale dans le contexte de la constitution de société.L’assurance-crédit constitue une innovation intéressante pour sécuriser les engagements pré-constitutifs. Cette technique permet de transférer le risque d’insolvabilité vers un assureur spécialisé, moyennant le paiement d’une prime. L’assureur évalue la solvabilité de la société en formation et fixe ses conditions en conséquence.
Clauses de résiliation automatique en cas d’échec constitutif
La prévision contractuelle de l’échec de la constitution offre une sécurité juridique appréciable pour toutes les parties. Ces clauses de résiliation automatique permettent d’organiser par anticipation les conséquences de l’abandon du projet de société ou de l’impossibilité de mener à bien l’immatriculation.La rédaction de ces clauses doit identifier précisément les événements déclencheurs de la résiliation automatique. L’impossibilité d’obtenir l’immatriculation dans le délai prévu, l’abandon du projet par les fondateurs, ou la survenance d’un événement rendant l’activité projetée illégale constituent autant d’hypothèses à envisager.L’organisation du retour à l’état antérieur mérite une attention particulière dans la rédaction. La clause doit prévoir les modalités de restitution des prestations déjà exécutées, d’indemnisation des frais engagés, et de répartition des coûts liés à la résiliation. Cette prévision contractuelle évite les contentieux ultérieurs.La notification de la résiliation automatique peut être subordonnée à l’accomplissement de formalités spécifiques. L’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception, ou la publication d’un avis dans un journal d’annonces légales peuvent constituer des conditions de validité de la résiliation.Ces clauses présentent l’avantage de responsabiliser les fondateurs tout en préservant les intérêts des cocontractants. La perspective d’une résiliation automatique incite à une gestion rigoureuse du processus constitutif et évite la prolongation artificielle de situations incertaines.
Stipulations relatives au transfert de propriété et aux droits acquis
Les stipulations relatives au transfert de propriété revêtent une importance particulière pour les contrats impliquant la livraison de biens avant l’immatriculation de la société. Ces clauses permettent d’organiser le transfert de propriété et la prise en charge des risques de manière sécurisée.La clause de réserve de propriété constitue un mécanisme protecteur efficace pour les fournisseurs. Cette stipulation maintient la propriété du bien livré dans le patrimoine du vendeur jusqu’au complet paiement du prix. En cas d’échec de la constitution ou de défaillance de la société, le fournisseur peut revendiquer ses biens.L’aménagement des garanties réelles peut compléter efficacement le dispositif contractuel. La prise d’un gage sur les équipements fournis ou d’une hypothèque sur les biens immobiliers acquis offre des sûretés supplémentaires. Ces garanties nécessitent toutefois des formalités d’enregistrement qui peuvent retarder leur constitution.Les droits de propriété intellectuelle méritent une attention spécifique dans les contrats de création ou de développement. La titularité des droits d’auteur, brevets, ou marques développés durant la phase pré-constitutive doit être clairement définie. Le transfert automatique de ces droits à la société lors de son immatriculation peut être stipulé contractuellement.La question de l’opposabilité aux tiers de ces transferts de propriété soulève des difficultés pratiques. Les formalités de publicité, lorsqu’elles existent, ne peuvent généralement être accomplies qu’après l’immatriculation de la société cessionnaire. Cette situation crée un décalage temporel pendant lequel l’opposabilité demeure fragile.
Alternatives juridiques et montages contractuels optimisés
Face aux complexités juridiques inhérentes aux engagements pré-constitutifs, plusieurs alternatives permettent d’optimiser la sécurisation des relations contractuelles tout en préservant la souplesse opérationnelle nécessaire aux entrepreneurs.La technique de la promesse synallagmatique de contrat offre une solution élégante pour différer les engagements définitifs. Cette approche consiste à conclure un avant-contrat qui organisera les conditions de la conclusion ultérieure du contrat définitif, une fois la société immatriculée. La promesse crée des obligations de faire et préserve les droits de chaque partie sans engager immédiatement leur responsabilité sur le contrat principal.Le mandat d’intérêt commun constitue une innovation contractuelle particulièrement adaptée aux opérations complexes impliquant plusieurs intervenants. Ce mécanisme permet de désigner un mandataire unique chargé de négocier et conclure l’ensemble des contrats nécessaires au projet. Le mandataire agit au nom et pour le compte de la société en formation, avec un mandat précis et limité dans le temps.La fiducie-gestion représente une alternative sophistiquée pour les projets d’envergure. Cette technique permet de confier la gestion des biens et droits nécessaires au projet à un fiduciaire professionnel, qui les administrera jusqu’à l’immatriculation de la société bénéficiaire. La fiducie crée un patrimoine d’affectation distinct, ce qui isole les risques et facilite le transfert ultérieur.Les groupements momentanés d’entreprises ou sociétés en participation peuvent constituer des structures transitoires appropriées pour certains projets. Ces entités, dépourvues de personnalité morale, permettent néanmoins d’organiser les relations entre les futurs associés et de préparer la constitution de la société définitive.L’utilisation de sociétés coquilles préconstitutées offre une solution pragmatique pour les entrepreneurs pressés par le temps. Ces sociétés dormantes, constituées à l’avance par des professionnels spécialisés, peuvent être acquises et adaptées rapidement aux besoins du projet. Cette technique évite les délais constitutifs tout en offrant l’avantage d’une personnalité morale immédiate.La structuration en holdings permet d’optimiser la gestion des participations et des garanties. La société holding peut être constituée en amont et servir de véhicule pour la création des filiales opérationnelles. Cette architecture présente des avantages fiscaux et facilite les opérations ultérieures de croissance externe.Les contrats de management transitoire constituent une réponse adaptée aux besoins opérationnels immédiats. Ces accords permettent de confier la gestion d’une activité existante à l’équipe dirigeante de la future société, en attendant la finalisation de l’acquisition ou de la constitution. Cette solution préserve la continuité d’exploitation tout en respectant le cadre juridique.Quelle que soit l’alternative retenue, la documentation juridique de l’opération demeure cruciale. L’assistance d’un conseil spécialisé permet d’identifier la solution optimale et de rédiger les actes correspondants dans le respect des contraintes réglementaires et fiscales applicables. Cette approche préventive constitue un investissement rentable au regard des risques évités et des opportunités préservées.
